Brad Pitt est au bout du rouleau. Morgan Freeman est désemparé, Kevin Spacey est plus malsain que jamais. La Sainte Trinité est en place. Sur l’échiquier de David Fincher, chaque pion est à sa place. L’instant est émotionnellement chargé, parfois difficile à regarder. Il n’en reste pas moins légendaire, signant l’ultime acte traumatique de l’un des plus grands thrillers de tous les temps.
La force de David Fincher dans le final de Seven, c’est de ne jamais se laisser emporter par l’intensité de son sujet. Il y avait pourtant de quoi : au terme de l’éprouvante traque d’un tueur en série imitant les sept péchés capitaux, le détective David Mills se retrouve face à son suspect principal. Quelques mètres plus loin, un colis avec la tête décapitée de sa femme enceinte. Mills a un flingue dans la main, John Doe est agenouillé au sol, tous les ingrédients sont propices à commettre l’irréparable. Pourtant, Fincher est en contrôle, méthodique comme à son habitude. Le cinéaste multiplie les plans où il joue du contraste entre les plans éloignés de son cadre désertique, et les focus rapprochés sur le visage tiraillé de Brad Pitt. Son nez défoncé, son air torturé, ses yeux humides et ses sourcils plissés de douleurs : Fincher s’attarde sur chaque détail, il ne laisse rien passer. Les tremblements de son cadre reflètent l’agitation interne du détective, son conflit grandissant qui lui force à regarder l’évidence droit dans les yeux. Chaque tentative de déni résonne comme une agonie contagieuse. Mills sait exactement ce qui se trouve dans cette boîte. Et vous aussi.
Si elle peut paraître excessive lorsque la scène est sortie de son contexte, la réaction de Brad Pitt est finalement à la hauteur du crime. Un traumatisme d’une sauvagerie sans nom, qui va pousser l’auteur dans ses retranchements. Certains parleront de surjeu, on évoquera plutôt une théâtralité, quelque chose qui vire pratiquement à la tragédie biblique (on parle quand même d’un film ayant pour sujet principal les 7 péchés capitaux). Ceux qui n’en avaient pas encore la certitude en 2002 viennent de découvrir le talent explosif de Pitt en tant qu’acteur, bien qu’il soit loin d’être seul dans cette scène. Morgan Freeman parvient à vous nouer le ventre sans que vous n’ayez besoin de voir l’intérieur du colis. Quant à Kevin Spacey, sa mesure glaciale est une fois de plus terrifiante, accentuée par les close-ups obsessionnels de Fincher qui ne quitte pas son tueur jusqu’au trépas final.
// L’EXPRESSION DU TRAUMATISME
La manière dont John Doe est exécuté reste d’ailleurs très intéressante. Après avoir enchaîné une foule de plans rapprochés, la caméra de Fincher se poste subitement à plusieurs dizaines de mètres. La dépouille de John Doe s’écroule comme une simple silhouette à distance. Fincher semble tout faire pour que ce trépas n’ait rien d’une expérience satisfaisante. Le plaisir cathartique de la vengeance est complètement émasculé. Il y a aussi ce plan en contre-plongée, dans lequel Pitt vide son chargeur en direction du sol (la dépouille de John Doe), alors que Somerset lui tourne le dos (ce qui là encore n’est pas anodin). Fincher nous en montre ici le minimum. Il n’y a pas une once de soulagement dans cette pulsion vengeresse de Mills, ce qui était probablement le but recherché. Car faut-il vraiment le rappeler ? La mort du méchant n’a dans Seven rien d’une victoire du bien. C’est même l’inverse, puisque John Doe accomplit à ce moment-là son plan, sa destinée, sa prophétie tordue qui signe la double-illustration sanglante des deux derniers péchés capitaux : l’envie, puis la colère. La scène du meurtre marque ainsi une rupture entre l’audience et Mills, dont nous serons les témoins, mais jamais les complices.
À l’origine, le plan de David Fincher était de s’arrêter là. Capturer le meurtre, fondu au noir, puis laisser le spectateur digérer pendant le générique final. Mais durant les séances tests, les lumières qui se rallumaient minimisaient l’effet. Une citation d’Hemingway a donc été ajoutée. « Le monde est un bel endroit qui mérite qu’on se batte pour lui. Je suis d’accord avec la seconde partie ». La vérité, c’est que la fin de Seven a notoirement fait l’objet d’une immense prise de tête au moment de la conception du film. Au départ, le studio rejetait l’idée de la tête dans une boîte comme un mauvais implant. Hors de question de mettre en scène une chose pareille. Des fins alternatives furent alors proposées. Il était question de se lancer dans une course contre la montre pour sauver la femme enceinte de Mills. Il y avait aussi une fin dans laquelle Somerset finissait par tuer John Doe dans un acte sacrificiel, pour que Mills (qui a toute la vie devant lui) n’ait pas à le faire. On ne parlera pas de celle où John Doe tue Mills avant de se faire abattre par Somerset. Il y en a eu d’autres, mais Pitt, Freeman et Fincher ont tous les trois fait bloc, en menaçant de quitter le projet si la scène de la boîte n’était pas intégrée au montage final. Les trois hommes se sont battus, et ils ont finalement obtenu gain de cause, chose dont nous n’irons pas nous plaindre dans ces pages. Car en plus de représenter l’un des plus grands climax du cinéma, cette fin choc vient finalement parfaire la peinture pessimiste d’un monde poisseux et corrompu, rongé par la contagion d’un mal qui n’épargne décidément personne.
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